« Slalom » de Charlène Favier : La critique + Podcast « Les relations toxiques au cinéma »

Podcast : 5 films au contenu empoisonné d’une relation toxique !

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« Slalom » : Première glissade réussie pour Charlène Favier

Alors que l’été arrive à grands pas, c’est l’occasion de se rafraîchir un peu dans les salles de cinéma avec Slalom, premier film remarquable de Charlène Favier qui aborde le sujet scabreux du harcèlement sexuel dans le monde du sport. Un long-métrage coup de poing porté par un duo d’acteurs lumineux. En piste !

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Lyz, 15 ans, vient d’intégrer une prestigieuse section ski-études au lycée de Bourg-Saint-Maurice en Savoie. Son entraîneur, Fred, s’engage à faire d’elle une championne. Pleine d’admiration pour cet homme et portée par sa passion, Lyz fera tout pour réussir… malgré son talent et ses bons résultats, elle va basculer sous l’emprise de Fred.

Bienvenue dans le monde difficile et intraitable de la compétition sportive. Charlène Favier nous expédie d’office dans ce milieu, en ouvrant son film sur la respiration haletante de l’héroïne lors d’un énième entraînement. Grâce à une succession de scènes détaillées et une caméra proche du personnage principal, on comprend tout de suite la dureté de son quotidien, et, malgré tout, à quel point tout cela est viscéral pour elle.

Noée Abita dans le rôle de Lyz. En arrière-plan, Jérémie Renier dans le rôle de Fred

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Lyz est née pour skier. Depuis l’âge de quatre ans, elle enchaîne les championnats et les podiums, avec un objectif : les Jeux Olympiques. Son planning très intense l’éloigne de ses parents déjà peu présents, au point de vivre seule dans un appartement. Le film comporte de nombreuses scènes de compétition, très bien réalisées. La caméra suit de près la sportive en train de dévaler les pistes, ce qui renforce l’aspect réaliste et retient toute l’attention du spectateur : sera-t-elle assez rapide ? Fera-t-elle un sans-faute ? En opposition à ces scènes haletantes : une très belle photographie, signée Yann Maritaud. Les plans contemplatifs des montagnes enneigées du Val d’Isère se succèdent comme des pauses entre chaque scène, invitant à la réflexion.

Car de la réflexion, il y en a. L’un des éléments majeurs du film, et des plus perturbants, est la relation ambigüe entre Lyz et son coach. Jérémie Renier est impeccable, comme toujours. Il est glaçant – sans mauvais jeux de mots – dans le rôle de l’entraîneur à la fois autoritaire et séduisant. Il n’avait probablement plus autant troublé depuis son rôle de mystérieux psychothérapeute dans L’Amant Double de François Ozon. L’acteur donne la réplique à Noée Abita, une jeune pousse qui fait des débuts remarqués au cinéma. L’actrice de 22 ans livre une prestation talentueuse de cette skieuse prête à tout pour réussir.

Le film se concentre donc sur l’emprise et la domination que peut avoir un entraîneur adulte sur une jeune sportive – avec, notamment, deux scènes assez violentes sur le plan psychologique -, et la lente descente aux enfers vécue par la jeune fille – renforcée par des jeux de lumière rouge intense. Charlène Favier évite pourtant tout manichéisme… et c’est là que réside la force de son film.

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La cinéaste a elle-même été victime de violences sexuelles dans le milieu du sport quand elle était adolescente, mais elle arrive tout de même à laisser de côté toute part d’autobiographie ou tout règlement de compte personnel. Elle se contente de puiser l’inspiration là où il faut, pour raconter une autre histoire, celle de Liz.

Mais si Slalom parle de la domination venue de l’extérieur, il évoque aussi la domination que Lyz exerce sur elle-même : la jeune fille met son corps à rude épreuve pour réussir. Elle doit le sculpter, le restructurer – perdre de la masse graisseuse et prendre du muscle – pour atteindre son objectif. C’est presque de la torture, notamment quand elle muscle ses cuisses par électrostimulation : elle continue de faire travailler (et d’épuiser) son corps même quand elle ne s’entraîne pas.

Au-delà de cette relation entraîneur-sportif / dominant-dominé, Slalom brosse donc le portrait d’une adolescente tourmentée et discrète, et nous montre avec vigueur son obsession de la compétition et de la réussite. Un premier film remarquable pour une réalisatrice à l’avenir tout tracé, à aller voir en priorité lors de la réouverture des salles.

17 /20

Film ayant obtenu le label Cannes 2020

Fanny BL

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Musiques entendues dans le podcast 

♪ Morceau « Première victoire », tiré de la bande originale du film Slalom de Charlène Favier (2021), composée par LoW Entertainment (Alexandre Lier, Sylvain Ohrel et Nicolas Weil)

♪ Morceau « Whiplash », composée par Hank Levy, (1973), tiré du film Whiplash de Damien Chazelle (2014). Varese Sarabande Records – Universal Music Group

♪ Morceau « Stumbled Beginnings », tiré de la bande originale du film Black Swan de Darren Aronofsky (2010), composée par Clint Mansell, à partir de l’œuvre de Piotr Ilitch Tchaïkovski pour le ballet Le Lac des cygnes

♪ Morceau final tiré de la bande originale du film Mon Roi de Maïwenn (2015), composée par Stephen Warbeck

♪ Musique originale du film D’après une histoire vraie de Roman Polanski (2017), composée par Alexandre Desplat 

3 commentaires sur “« Slalom » de Charlène Favier : La critique + Podcast « Les relations toxiques au cinéma »

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  1. Super ce podcast ! J’ai adoré ce focus sur les relations toxiques. Perso, sur ta liste de films, je n’ai vu que Whiplash et Black Swan. Et je me souviens que Whiplash m’avait perturbée !! En tout cas, super de faire la critique d’un film dans la partie écrite et un autre sujet en podcast. J’adore l’idée !!!

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