Ecoutez d’abord ce podcast :
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Plans symétriques, prouesses techniques, personnages nombreux et fantasques… Avec The French Dispatch, Wes Anderson « fait du Wes Anderson ». A travers de nouvelles histoires farfelues, il rend un bel hommage à la profession de journaliste et à la culture française… mais manque le coche sur les plans scénaristique et rythmique.
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The French Dispatch est un recueil de quatre petites histoires tirées d’une édition du magazine américain éponyme, publié dans une ville française fictive du XXème siècle baptisée « Ennui-sur-Blasé ».
Wes Anderson fait partie de ces cinéastes qui ont réussi à bâtir leur empire, au style bien particulier et reconnaissable entre mille : des couleurs pastel, une manière saccadée de filmer et d’enchaîner les plans, une touche créative, et un travail toujours millimétré… Ici, pas de problème : on retrouve bien l’univers loufoque du réalisateur.

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Il faut le reconnaître : The French Dispatch est magnifique sur le plan visuel, avec toujours une patte esthétique impeccable, et l’utilisation de toute une palette de techniques cinématographiques, comme le noir et blanc, l’animation, ou encore le changement de formats de projection. L’une des bonnes idées : le noir et blanc et la couleur s’alternent d’une seconde à l’autre, avec un interrupteur en guise de déclencheur, comme si on allumait une pièce… Cette photographie géniale est signée Robert D. Yeoman.
Le long-métrage propose aussi des plans léchés comme si on était face à des tableaux, ainsi que des scènes donnant l’illusion d’un arrêt sur image, quand un groupe d’acteurs se fige, à la manière d’un flash mob, tandis que la voix-off continue de raconter l’histoire.
The French Dispatch contient aussi des références intéressantes, comme les événements de Mai 68 en France, avec la rébellion d’un groupe de jeunes (dans le troisième récit). De multiples autres références littéraires, musicales et cinématographiques viennent enrichir le film, dont des chansons françaises qui rendent hommage à notre culture (Christophe, Chantal Goya, Charles Aznavour).

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Comme à chaque fois chez Wes Anderson, on retrouve toute une communauté d’acteurs : les éternels Bill Murray (qui collabore avec le cinéaste pour la 9ème fois), Tilda Swinton, Edward Norton, Owen Wilson ou encore Adrien Brody, ainsi que deux Français déjà vus dans The Grand Budapest Hotel, Léa Seydoux et Mathieu Amalric. Et comme le cinéaste a du flair, il n’oublie pas d’inclure deux jeunes pousses tricolores : Timothée Chalamet (Dune) et Lyna Khoudri, César du meilleur espoir féminin en 2020 pour son rôle dans Papicha.
Autre élément habituel chez Wes Anderson : l’humour absurde et les blagues subtiles, notamment avec les jeux d’acteurs, les comiques de situation, et même les noms des endroits, comme ici, celui de la ville française fictive où se déroulent les récits, « Ennui-sur-blasé », qui fait immédiatement sourire.

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Le gros problème de The French Dispatch se trouve du côté du scénario et du rythme. Malgré de bonnes idées, chaque récit (sauf peut-être le deuxième) comporte de grosses longueurs. On a du mal à « entrer » dans les différentes histoires… Le contenu en devient presque soporifique.
Wes Anderson nous avait éblouis avec The Grand Budapest Hotel (2013)… Difficile de faire encore mieux, ou même aussi bien, après ce petit chef-d’œuvre. Son dixième long-métrage n’est clairement pas son meilleur. Il plaira probablement aux fans de longue date grâce à la part affective, mais devrait clairement ennuyer le reste du spectatorat.
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Film présenté en Compétition Officielle au Festival de Cannes 2021
11 / 20

Fanny BL