« Tout s’est bien passé » : La critique + L’interview d’André Dussollier

Dans le podcast, ci-dessous, retrouvez l’interview d’André Dussollier, premier rôle dans « Tout s’est bien passé » de François Ozon :

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« Tout s’est bien passé » : François Ozon dérange encore, pour notre plus grand bien

Que feriez-vous si un membre de votre famille vieillissant vous demandait de l’aider à mourir dignement ? C’est la question délicate posée par François Ozon dans son dernier film, Tout s’est bien passé.

Le thème de l’euthanasie est abordé avec finesse, mais le cinéaste français nous avait habitué à mieux… Son long-métrage doit surtout son intérêt à la prestation d’André Dussollier.

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A 85 ans, André (André Dussollier) est hospitalisé après un accident vasculaire cérébral. Quand il se réveille, le vieil homme est diminué, mais sa santé est stabilisée. Malgré cette amélioration, ce grand curieux, pourtant attaché à la vie, demande à ses deux filles, Emmanuèle (Sophie Marceau) et Pascale (Géraldine Pailhas), de l’aider à mourir dignement… Commence alors un difficile cheminement pour toute la famille.

François Ozon aime décidément s’attaquer à des sujets sensibles. Après la prostitution des adolescents dans Jeune & Jolie (2013), la transidentité dans Une nouvelle amie (2014), ou encore la pédophilie au sein de l’Eglise dans Grâce à Dieu (2019), le cinéaste aborde cette fois le thème de l’euthanasie, toujours très tabou en France, bien souvent médiatisé, et qui ne cesse de soulever le débat. Pour cela, il a adapté le roman éponyme d’Emmanuèle Bernheim, qui avait d’ailleurs collaboré avec François Ozon pour l’écriture des scénarios de trois de ses films (Sous le Sable, Swimming Pool et 5×2). Mais cette fois, le réalisateur choisit la carte de la pudeur et de la délicatesse, dans la continuité de son film précédent, Eté 85 (2020).

Le réalisateur apporte une réflexion intéressante sur l’euthanasie, et confronte le spectateur à des questions difficiles, comme : que feriez-vous dans ce genre de situation ? Faut-il répondre à la volonté du membre de sa famille, mais risquer d’être accusé d’homicide volontaire (ou de non-assistance à personne en danger, au choix), ou bien ignorer sa requête, quitte à le rendre profondément malheureux ? Choix cornélien…

Sophie Marceau dans le rôle d’Emanuèle © Carole BETHUEL / Mandarin Production / Foz

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Dans ce long-métrage, l’affaire est encore plus compliquée, et peut-être plus difficile à comprendre, car le personnage d’André n’est ni mourant, ni souffrant : il est certes affaibli par son AVC, mais sorti d’affaire, et entouré de ses deux filles. Alors, pourquoi veut-il tant en finir ? Ce souhait ressemble un peu à un « caprice de riche », surtout quand on sait combien peut coûter une opération d’euthanasie en Suisse, par exemple, comme dans cette histoire. On n’avait pas ressenti la même incompréhension face à Blackbird de Roger Michell, autre film traitant de l’euthanasie, ou plutôt du suicide assisté, où l’héroïne, incarnée par Susan Sarandon, est dans une situation un peu plus inévitable : elle est de toute façon condamnée à mourir, car atteinte d’une maladie dégénérative incurable, et souhaite accélérer la cadence, pour éviter l’agonie.

Il aurait d’ailleurs été plus intéressant de mettre en scène une famille pauvre, et de voir comment elle aurait pu s’en sortir pour mener une opération aussi onéreuse. Or, François Ozon a choisi une famille aisée. Se faire euthanasier apparaît alors presque comme un « luxe« , même si la pratique reste difficile à réaliser, puisque ni le corps médical, ni la loi ne pourront aider Emmanuèle et Pascale.

Géraldine Pailhas et Sophie Marceau © Carole BETHUEL / Mandarin Production / Foz

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François Ozon fait tout de même preuve d’habileté, en arrivant à mêler le tragique au burlesque, même avec un sujet aussi grave. Il arrive à nous donner parfois envie de rire, alors que la situation est loin d’être drôle. C’est le cas dans la scène où André va jusqu’à choisir la date de sa mort, et n’arrive pas à se mettre d’accord avec ses filles, qui tentent de repousser le moment au maximum en trouvant des excuses, comme l’audition de clarinette du petit-fils.

Mais la vraie pépite de Tout s’est bien passé, c’est André Dussollier. L’acteur, âgé de 75 ans dans la vraie vie, est méconnaissable dans le rôle de ce père de famille usé, vieillissant, qui en a marre, et veut tout simplement mettre un terme à sa vie. Son jeu est époustouflant et convaincant dès les premières minutes du film, et jusqu’à l’arrivée du générique… Il arrive même à rendre son personnage attachant, alors qu’il incarne un homme égoïste et un peu bougon, parfois odieux. Finalement, André Dussollier sauve aussi le film d’un potentiel ennui, que certains spectateurs pourraient éventuellement ressentir à plusieurs reprises en raison de quelques longueurs.

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14+ / 20

Film en compétition officielle au Festival de Cannes 2021

Sophie Marceau et André Dussollier © Carole BETHUEL / Mandarin Production / Foz

Fanny BL

3 commentaires sur “« Tout s’est bien passé » : La critique + L’interview d’André Dussollier

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  1. Une thématique difficile à aborder, décidément. Surtout pour bien l’afficher sur nos écrans, bravo à François Ozon, et surtout merci à toi Oreille Cinéphile de nous gâter avec cet interview de M. Dussollier!

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  2. Trop sympa le podcast avec l’interview d’André Dussollier ! Il parle super bien et il aborde tous les aspects !! J’ai vraiment adoré l’interview, c’est parfait pour aborder le film. Sinon, clairement, la fin de vie, c’est pas un sujet facile à aborder (au ciné mais aussi dans la vraie vie). Le sujet est peut-être un peu trop « dur » pour que j’aille le voir au ciné, même si – comme tu l’expliques – on retrouve également des passages drôles. Bonne critique encore une fois !

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